(Ottawa, ON) – Le Chef national de l’Assemblée des Premières Nations (APN), Perry Bellegarde, se félicite de l’adoption d’un projet de loi fédéral visant à faire progresser la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, et demande instamment sa pleine mise en œuvre au Canada afin de respecter les normes nécessaires à la dignité, à la survie et au bien-être des peuples autochtones.
C’est un grand pas en avant pour les Premières Nations et pour le Canada – c’est une mesure concrète, c’est l’histoire qui s’écrit », a déclaré le Chef national de l’APN, Perry Bellegarde, avant d’ajouter que l’adoption de cette législation fédérale intervient après des décennies de plaidoyer par les Premières Nations et les peuples autochtones du monde entier. « Cette loi visant à mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones au Canada peut être une voie vers la réconciliation, guidée par nos droits inhérents et nos droits issus de traités. Sa pleine mise en œuvre fera en sorte que les droits des Premières Nations seront respectés et exercés, et elle est essentielle pour lutter contre toutes les formes de racisme et de discrimination au Canada. »
La Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, adoptée le 16 juin par le Sénat du Canada, exige du gouvernement fédéral qu’il travaille en collaboration avec les Premières Nations et les autres peuples autochtones pour élaborer un Plan d’action national en vue de mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies, y compris des mesures pour lutter contre les préjugés et éliminer toutes les formes de violence et de discrimination à l’égard des peuples autochtones. Bien que la Déclaration des Nations Unies ait déjà des retombées juridiques au Canada, cette nouvelle loi, qui exige que les lois canadiennes soient examinées et remaniées afin de respecter les obligations internationales du Canada en matière de droits humains, rejette explicitement les doctrines racistes de la découverte et de terra nullius. Elle prévoit également le dépôt de rapports réguliers au Parlement sur les progrès réalisés.
« L’adoption du projet de loi C-15, maintenant la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, signifie que nous disposons maintenant d’un processus selon lequel les lois et les politiques doivent être modifiées afin que les droits des Premières Nations soient respectés et mis en œuvre », a déclaré le Chef national Bellegarde. « Les Premières Nations détermineront leurs propres priorités et la façon dont elles souhaitent travailler avec le Canada. Et j’exhorte tous les gouvernements du Canada à travailler afin de veiller à la pleine mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. »
La mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones par tous les ordres de gouvernement, y compris l’élaboration d’un Plan d’action national, de stratégies et d’autres mesures concrètes pour atteindre les objectifs énoncés dans la Déclaration, est au cœur de deux des Appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et figure également dans les Appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
L’APN est l’organisation nationale qui représente les peuples des Premières Nations au Canada. Suivez l’APN sur Twitter @AFN_Updates.
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DOCUMENT D’INFORMATION
Le Parlement du Canada a adopté la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (anciennement le projet de loi C-15) qui recevra bientôt la sanction royale.
Cette réalisation historique est le fruit de décennies de plaidoyer de la part des dirigeants des Premières Nations, tant au niveau international qu’au Canada, pour obtenir le respect et la mise en œuvre des droits humains des peuples autochtones.
La Loi reconnaît explicitement l’obligation du Canada de respecter et promouvoir les droits inhérents des peuples autochtones, qui sont affirmés dans la Déclaration des Nations Unies, y compris le droit à l’autodétermination et le droit au respect et à l’application des traités. La nécessité urgente de respecter et de promouvoir les droits issus de traités des peuples autochtones est affirmée à plusieurs reprises. La Déclaration contient des normes internationales en matière de droits humains que le Canada et tous les membres de l’ONU ont affirmées et réaffirmées à maintes reprises.
La Loi n’élimine ni ne restreint aucun droit. Il s’agit de prendre des mesures, attendues de longue date, pour respecter et mettre en œuvre des droits que les Premières Nations possèdent déjà.
Fait important, la Loi exige du gouvernement fédéral qu’il travaille avec les peuples autochtones à la réforme des lois nationales et à l’élaboration d’un plan d’action national pour mettre entièrement en œuvre la Déclaration.
En quoi la Loi consiste-t-elle?
La Loi exige que le gouvernement fédéral « travaille en consultation et en collaboration » avec les peuples autochtones pour s’assurer que les lois du Canada sont conformes aux normes minimales en matière de droits de la personne affirmées dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007. Dorénavant, le gouvernement fédéral devra travailler en collaboration avec les peuples autochtones pour veiller à ce que les lois, les politiques et les pratiques opérationnelles fédérales respectent ces normes minimales en matière de droits de la personne.
La Loi confirme explicitement que la Déclaration des Nations Unies doit être utilisée pour interpréter les lois du Canada. (Les tribunaux canadiens ont déjà utilisé la Déclaration exactement de cette façon.) La nouvelle loi favorisera une plus grande sensibilisation au travail nécessaire pour respecter et mettre en œuvre les droits humains des peuples autochtones.
La Loi prévoit l’obligation pour le gouvernement du Canada de « prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que les lois fédérales soient compatibles avec la Déclaration ». Cette exigence entre en vigueur immédiatement. Les fonctionnaires du gouvernement doivent faire tout leur possible pour interpréter et appliquer les lois du Canada d’une manière conforme aux dispositions de la Déclaration. Cette exigence devrait guider et façonner les positions prises par le gouvernement fédéral dans les négociations et devant les tribunaux. Un processus officiel devra permettre d’examiner les lois et d’éventuellement les présenter de nouveau au Parlement pour qu’elles soient abrogées ou réformées.
La Loi prévoit également pour le gouvernement fédéral l’obligation « d’élaborer et de mettre en œuvre un plan d’action visant à atteindre les objectifs de la Déclaration ». Ce plan d’action devra comprendre des mesures concrètes pour garantir le respect et la mise en œuvre des droits de la personne des peuples autochtones.
Pour toutes ces mesures, la Loi stipule que le gouvernement doit travailler en « consultation et en collaboration » avec les peuples autochtones. Elle exige aussi la présentation régulière de rapports au Parlement, qui seront rendus publics. En outre, elle engage le gouvernement à étudier des mesures de reddition de comptes supplémentaires.
Les conseillers juridiques de l’APN ont confirmé que rien dans la Loi ne peut être utilisé pour supprimer, amoindrir ou unilatéralement redéfinir les droits des peuples autochtones.
Pourquoi la mise en œuvre de la Déclaration des Nations Unies est-elle aussi importante?
La Déclaration est un instrument international des droits de la personne qui établit « les normes minimales nécessaires à la survie, à la dignité et au bien-être des peuples autochtones ». Tous les gouvernements sont tenus de respecter et de mettre en œuvre les dispositions de la Déclaration.
La Déclaration a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies il y a plus de treize ans, le 13 septembre 2007. Elle visait à combler une lacune importante dans le système international des droits de la personne en affirmant explicitement un large éventail de droits de la personne universels qui, dans la pratique, étaient largement refusés aux peuples autochtones. Il s’agit notamment du droit à l’autodétermination et des droits collectifs aux terres, aux territoires, aux ressources, à la protection environnementale, à la culture et à l’identité.
La Déclaration revêt une importance particulière parce que les peuples autochtones ont participé activement à sa rédaction. Il s’agissait, entre autres, de dirigeants et de militants de base des Premières Nations.
La Commission de vérité et de réconciliation du Canada a appelé la Déclaration le « cadre de la réconciliation ». Le Canada a adhéré à tous les Appels à l’action de la Commission. La Commission de vérité et de réconciliation et l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées ont demandé au Canada de mettre en œuvre la Déclaration par l’intermédiaire de lois, de politiques et de mesures collaboratives.
Que signifie le fait de dire que la Déclaration des Nations Unies « a une valeur juridique » au Canada?
Les tribunaux canadiens utilisent régulièrement les instruments internationaux relatifs aux droits de la personne pour interpréter le droit national. Les cours et les tribunaux des droits de la personne utilisent déjà la Déclaration des Nations Unies exactement de cette façon.
En outre, la Déclaration consolide des normes internationales qui sont déjà juridiquement contraignantes pour les gouvernements au Canada. Ces normes sont, entre autres, celles qui ont déjà été énoncées dans des conventions internationales dont le Canada est un des signataires et celles qui sont apparues dans ce qu’on appelle le « droit international coutumier ».
Par exemple, le droit à l’autodétermination est affirmé à la fois dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. La condamnation de la discrimination raciale est énoncée dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Que contiendra le Plan d’action national?
La Loi stipule que le plan d’action doit comporter des mesures pour :
- « lutter contre les injustices, à combattre les préjugés et à éliminer toute forme de violence et de discrimination, notamment le racisme et la discrimination systémiques »;
- « promouvoir le respect et la compréhension mutuels et de bonnes relations, notamment grâce à de la formation sur les droits de la personne »;
- « des mesures de contrôle ou de surveillance, des voies de recours, des mesures de réparation ou d’autres mesures de reddition de comptes en lien avec la mise en œuvre de la Déclaration mesures de responsabilisation en ce qui concerne la mise en œuvre de la Déclaration».
Comme le prévoit la Loi, le contenu du Plan d’action national doit être élaboré en consultation et en collaboration avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis, en tenant compte d’une approche fondée sur les distinctions.
Pourquoi le préambule de la Loi est-il important?
Le préambule de toute loi au Canada est un outil qui peut être utilisé pour en interpréter et en appliquer les dispositions. En d’autres termes, les préambules ont des effets juridiques.
La nouvelle loi comporte un préambule très solide. Un certain nombre de clauses du préambule méritent d’être soulignées, notamment les suivantes :
- Attendu que toutes les doctrines, politiques et pratiques qui reposent sur la supériorité de peuples ou d’individus — ou qui prônent celle-ci — en se fondant sur des différences d’ordre national, racial, religieux, ethnique ou culturel, y compris les doctrines de la découverte et de terra nullius, sont racistes, scientifiquement fausses, juridiquement sans valeur, moralement condamnables et socialement injustes;
- Attendu que que le gouvernement du Canada rejette toute forme de colonialisme et s’est engagé à promouvoir des relations avec les peuples autochtones qui soient fondées sur la bonne foi et sur les principes de justice, de démocratie, d’égalité, de non-discrimination, de bonne gouvernance et de respect des droits de la personne;
- Attendu que le gouvernement du Canada reconnaît que les relations avec les peuples autochtones doivent être fondées sur la reconnaissance et la mise en œuvre du droit inhérent à l’autodétermination, y compris le droit à l’autonomie gouvernementale;
- Attendu qu’il est urgent de respecter et de promouvoir les droits des peuples autochtones confirmés dans les traités, les accords ou les autres arrangements constructifs, et que ces traités, accords ou arrangements peuvent contribuer à la mise en œuvre de la Déclaration;
- Attendu que les mesures visant la mise en œuvre de la Déclaration au Canada doivent tenir compte de la diversité des peuples autochtones et, en particulier, de la diversité des identités, cultures, langues, coutumes, pratiques, droits et traditions juridiques des Premières Nations, des Inuits et des Métis, de leurs institutions et systèmes de gouvernance, de leurs liens avec la terre et des savoirs autochtones.
Quel est le lien entre le projet de loi C-262 et la nouvelle Loi?
Le projet de loi C-262 était un projet de loi d’initiative parlementaire proposé par l’ancien député Romeo Saganash. Il avait été adopté par la Chambre des communes en 2018, mais il a ensuite été bloqué par les tactiques dilatoires de quelques sénateurs. Le projet de loi C-262 n’a jamais été soumis à un vote final au Sénat.
Les éléments essentiels de la nouvelle loi ‒ l’affirmation de la valeur juridique de la Déclaration, l’engagement à réformer le droit, la création d’un plan d’action national, la présentation de rapports au Parlement et la collaboration avec les peuples autochtones ‒ sont semblables à ceux du projet de loi C-262. Cependant, la nouvelle loi utilise le projet de loi C-262 comme une « assise » et non comme un « plafond ».
D’où vient la Loi?
Pendant de nombreuses années, les Premières Nations ont plaidé en faveur d’une loi fédérale visant à affirmer les droits énoncés dans la Déclaration des Nations Unies et à garantir leur mise en œuvre par l’intermédiaire d’un plan d’action élaboré conjointement.
Le projet de loi d’initiative parlementaire de Romeo Saganash visant à mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies (projet de loi C-262) avait été largement soutenu par les Premières Nations. Les Chefs-en-assemblée avaient adopté une résolution demandant au Parlement d’adopter le projet de loi C-262. Lorsque le projet de loi C-262 a été bloqué par des tactiques d’obstruction au Sénat, les Chefs-en-Assemblée de l’APN ont adopté une résolution en décembre 2019, qui demandait qu’un projet de loi gouvernemental calqué sur le projet de loi C-262 soit présenté au Parlement dans un délai d’un an. La résolution 86/2019 de l’APN stipule que tout projet de loi de mise en œuvre présenté par le gouvernement doit être au moins aussi solide que le projet de loi C-262.
Dans les discours du Trône de 2019 et 2020, le Canada s’est engagé à préparer un tel projet de loi. Le ministre fédéral de la Justice, David Lametti, a déposé le projet de loi C-15 le 3 décembre 2020, après une courte période de discussion.
Des discussions sur le projet de loi ont eu lieu lors de l’AGA de l’APN en décembre 2020 ainsi que lors du Forum national des dirigeants des Premières Nations sur le projet de loi C-15, qui s’est tenu les 10 et 11 février 2021. Pendant deux jours, des centaines de dirigeants des Premières Nations ont discuté de cette loi importante en émettant divers points de vue.
Le projet de loi C-15 s’appuie sur les fondements du projet de loi C-262, mais il est plus détaillé et plus clair et comprend un préambule plus solide. L’équipe d’experts et conseillers juridiques de l’APN a conclu que le projet de loi C-15 répondait au mandat d’appuyer une loi gouvernementale qui serait au moins aussi solide que le projet de loi C-262. En fait, le projet de loi C-15 est plus solide que l’ancien projet de loi C-262 à plusieurs égards. Au cours des audiences parlementaires, les interventions de l’APN et d’autres intervenants pour réclamer des amendements répondant aux préoccupations des Premières Nations ont abouti aux améliorations ci-dessous.
Quels amendements ont été apportés au projet de loi au cours du processus parlementaire?
En réponse aux préoccupations exprimées par les Premières Nations, le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes a adopté un certain nombre d’amendements visant à clarifier et à renforcer le projet de loi C-15.
- Le délai pour la création d’un plan d’action national a été raccourci : il est passé de trois à deux ans.
- Dans la clause relative au plan d’action national et dans le préambule, le projet de loi faisait initialement référence à l’élimination de la violence et de toutes les formes de discrimination. Le projet de loi a été amendé afin d’inclure explicitement le racisme systémique.
- Dans le préambule, où la loi rejette toutes les doctrines de supériorité, il a été demandé d’ajouter une référence spécifique aux doctrines de la découverte et de terra nullius.
- Dans la partie du préambule qui fait référence à l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 et au principe et à la valeur constitutionnels sous-jacents de la protection des droits ancestraux et issus de traités, la déclaration suivante a été ajoutée : « les tribunaux canadiens ont déclaré que de tels droits ne sont pas figés et peuvent évoluer et s’accroître ».
- Un amendement grammatical a été apporté : alors que la version anglaise du projet de loi faisait initialement référence à son « objet » ‒ malgré le fait que deux objectifs distincts étaient cités ‒ la Loi utilise « objets ».
Quelles sont les prochaines étapes?
Étant donné qu’un délai de deux ans est prévu pour élaborer le premier Plan d’action national, le gouvernement fédéral devrait immédiatement discuter avec les Premières Nations pour élaborer un processus inclusif conforme aux exigences de la Déclaration elle-même.
L’adoption de la Loi établit également une obligation immédiate pour le gouvernement fédéral de s’assurer que ses lois sont conformes à la Déclaration des Nations Unies. Cette obligation devrait se refléter dans les positions prises par le gouvernement fédéral dans les négociations et devant les tribunaux, ainsi que dans la nécessité d’entreprendre un examen conjoint des lois et des politiques avec les Premières Nations afin de déterminer les situations où les lois, les politiques et les pratiques opérationnelles fédérales ne sont pas conformes aux normes minimales de la Déclaration des Nations Unies.